« Le nouveau RTE-T officiellement lancé le 03/04/2024 » (Ivo Cré, Polis)

 

« En 2018, il y avait 88 nœuds urbains, il y en a 431 aujourd’hui. Ce sont essentiellement des villes de plus de 100 000 habitants, et des discussions sont en cours avec les États membres pour intégrer et qualifier certaines zones peu densément peuplées. C’est une nouvelle échelle, à la mesure du réseau RTE-T révisé, qui a pour objectif de décarboner le transport dans le cadre du plan européen Fit for 55, et c’est aujourd’hui que cela commence : le réseau est officiellement lancé le 03/04/2024, et la nouvelle réglementation RTE-T entre en vigueur en juin 2024. L’enjeu étant : comment les villes s’intègrent-elles dans cette vision, et quels seront les impacts concrets sur la gestion des villes et des autorités de transport ? » 

Ivo Cré, directeur Politiques & Projets de Polis, lors des Connecting Europe Days 2024, le 03/04/2024.

« Les quatre objectifs clés de la feuille de route » (S. Brocks, DG MOVE)

 

« La nouvelle version du RTE-T entre en vigueur en juin 2024 ; c’est un jalon important pour l’Europe, les pays membres et les villes. Nous avons défini 431 nœuds urbains, intégrés dans le réseau, avec une vraie vision du réseau et des exigences que cela implique pour les villes. Il s’agit d’une vision partagée, construite avec les deux collèges de législateurs et avec les pays. Il y a bien sûr eu des négociations, mais l’intérêt de devenir un “nœud urbain” est vite apparu : ces villes concentrent le plus d’habitants et le plus de transports, et donc de problèmes de transports. Les corridors vont donc fluidifier le trafic. 

Nous sommes au début de l’implantation du RTE-T, la coopération de tous sera primordiale. Je place quatre objectifs clés sur la feuille de route à venir : 

• L’objectif final reste de décarboner le transport, dans le cadre de Fit for 2055
• Dès 2027, chaque nœud urbain devra partager ses data d’accessibilité, de sécurité et de mobilité. La sélection et la collecte des données reste à définir avec les autorités locales. 
• Une application de transports multimodaux devra être disponible dans chaque nœud urbain dès 2027, renseignant tous les moyens de transport disponibles, du vélo à la station de recharge électrique. 
• Enfin, chaque nœud urbain devra disposer d’un terminal de fret multimodal. 

J’identifie deux défis principaux. D’une part, il est nécessaire de dimensionner et de construire suffisamment d’infrastructures dans les villes ; et d’autre part, la coordination et la cohérence sont vitales. C’est pour cela que nous avons mis en place des points de contact nationaux, ainsi que des programmes nationaux, permettant de faire l’interface entre l'échelle européenne et les nœuds urbains. » 

Silke Brocks Cheffe adjoint de l’unité Réseaux de transport - Direction générale de la mobilité et des transports @ Commission européenne
, cheffe adjointe de l’unité Réseaux de transport, DG MOVE, Commission européenne • Principal organe exécutif de l’Union européenne• Création : 1958• Missions : - participer à la stratégie globale de l’UE,- proposer de nouvelles législations et politiques, assurer le suivi de… , lors des Connecting Europe Days 2024, le 03/04/2024.

« Penser nos schémas et connexions de la même manière à tous les échelons » (E. Van Den Brandt, ministre de la Mobilité de Bruxelles)

« Bruxelles est fière d'être la capitale de l’Europe, et nous savons l’importance de la connexion, à tous les niveaux. Nous travaillons justement notre dimension de nœud urbain, ce qui implique de prendre nos responsabilités car nous sommes connus pour nos difficultés de circulation. Nous voulons justement éviter d'être un corridor de trajets travail /maison, mais bien un lieu de vie. Cela implique de changer notre état d’esprit. L’implantation du RTE-T nous aide à grandir, à appartenir à un schéma plus grand, à une vision.

Aujourd’hui, à l'échelle du  quartier, nos mini-nœuds sont pensés en réseau, en connexion, pour toutes les mobilités : la marche, les transports. Aujourd’hui, les changements sont là : les Bruxellois sont à vélo, et nous réintégrons notre canal dans le schéma de transport local. 

Avec le nouvel RTE-T, nous pensons nos schémas et nos connexions de la même manière, à tous les échelons, puis nous passons à l'échelle : c’est un changement de dimension, et une nouvelle ère… Un exemple ? Aujourd’hui, le vélo cargo sert pour le dernier kilomètre, mais on peut aussi pédaler de Bruxelles à Rome ! » 

Elke Van Den Brandt Ministre de la Mobilité, des Travaux publics et de la Sécurité routière @ Gouvernement de la région de Bruxelles-Capitale
, ministre de la Mobilité et des travaux publics de Bruxelles, lors des Connecting Europe Days 2024, le 03/04/2024.

« Les villes sont à la fois le dernier kilomètre et le premier lorsqu’elles sont portuaires » (C. Trautmann, coordinatrice RTE-T)

« Le corridor RTE-T Mer du Nord-Baltique présente un intérêt stratégique certain : il relie Anvers à Helsinki, avec 90 nœuds urbains, et peut-être plus à terme, avec les villes ukrainiennes. Ces nœuds urbains peuvent nous donner l’occasion de réussir le nouveau RTE-T, ou de le rater complètement. Avec Mathieu Roche, nous avons écrit un papier expliquant d’une part l’intérêt stratégique des corridors, d’autre part notre vision des villes. Dans notre système, les villes sont à la fois le dernier kilomètre, bien sûr, mais aussi le premier, car nous avons des villes portuaires.

Les corridors, qui intègrent à la fois la longue distance et la multimodalité, sont des moteurs de mobilité verte, si l’on tient en compte de l’ensemble des aspects : liens avec les zones rurales autour des villes, connexions des aéroports avec le rail à grande vitesse, etc. Les nœuds urbains doivent répliquer cette multimodalité dans leur PMUD Plan de mobilité urbaine durable , et s’intégrer dans les corridors. C’est la clé du succès, et d’une nouvelle ère pour l’Europe ; d’ailleurs, les corridors prennent aussi en compte la mobilité militaire.

Cela implique de se parler, à tous les échelons, entre villes, entre États, entre réseaux et entre corridors : nous avons mis une nouvelle gouvernance et une nouvelle méthodologie, qui donne à chacun sa place dans notre forum. Nous rencontrons aussi des difficultés : par exemple, en Allemagne, les citadins ne veulent plus de trains de fret dans leurs villes. De même, les solutions adaptées aux villes ne fonctionnent pas toujours en périurbain. La solution à tout cela consiste à prendre en compte la parole des citoyens. »

Catherine Trautmann, coordinatrice européenne des RTE-T pour le corridor RTE-T Mer du Nord-Baltique, lors des Connecting Europe Days 2024, le 03/04/2024.

« Les autorités de transport doivent coordonner au-delà de l’administratif » (N. Di Volo, BEI Jaspers)

• « Notre mission est d’apprendre puis de partager comment fonctionne un nœud urbain. Avec le RTE-T se joue un changement d’approche sur la longue distance et les infrastructures. Les principaux corridors sont en place, et il y a 49 nœuds urbains en Espagne, soit plus de 10 % des nœuds urbains de l’ensemble du réseau européen, de diverses tailles.
• A Madrid, il y a beaucoup d’infrastructures, mais nous apprenons à mieux utiliser les ressources, à mieux planifier et à mieux partager. Les navetteurs empruntent aussi le réseau RTE-T, et comment bien les intégrer dans ce réseau pensé pour la longue distance ? Les villes espagnoles, qui s’impliquent déjà pour beaucoup d’entre elles dans la démarche “Cities for 2040”, considèrent très positivement ces corridors.
• Les autorités de transport doivent coordonner au-delà de l’administratif. Elles doivent aussi voir plus loin que les frontières, et penser à la longue distance. Cela crée une connexion entre le local et le national, et même plus loin. Elles savent qu’il reste beaucoup à faire, et tout le monde est prêt.
• Dans le cadre des démarches d'évaluations d’environnement stratégique, les coopérations s’avèrent indispensables, et les gens apprennent à parler avec leurs voisins. L’approche multimodale génère aussi de véritables évolutions.
• Par exemple, en Grèce, les autorités de transport public ont aussi pris en charge une partie de la gestion des transports individuels. C’est plus facile dans des petits pays tels que l’Irlande, Chypre ou Malte, du fait de la proximité des acteurs et des modes, mais l’impulsion vient de l’Union. Enfin, tout ce travail contribuera à la résilience des infrastructures et des villes, et à l’adaptation au changement climatique. »

Neri Di Volo, spécialiste des transports, BEI Jaspers, lors des Connecting Europe Days 2024, le 03/04/2024.

« La gouvernance est un enjeu : les villes doivent aussi être présentes dans la gouvernance des corridors »

« La majorité des villes membres d’Eurocities sont des nœuds urbains. Nous avons d’ailleurs mis en place un groupe de travail pour éveiller l’intérêt sur les corridors RTE-T, avec 50 villes partenaires. Des indicateurs sont créés, nous instaurons aussi une nouvelle gouvernance, à plus haute échelle : l’urban node alliance. Nous avons publié un article le 02/04/2024 pour exposer comment nous concevons notre rôle d’interface, mais aussi de lieu de vie, de travail. Les villes sont satisfaites : les exigences sont claires, il y a un calendrier. En revanche, la gouvernance reste un enjeu, et les villes doivent aussi être présentes dans la gouvernance des corridors. »

Peter Staelens, responsable de la mobilité chez Eurocities, lors des Connecting Europe Days 2024, le 03/04/2024.