« La place du transport public est au coeur de la demande de mobilité » (M.-A. Debon, UTP)
« Après avoir plongé en 2020, l’offre s’est rétablie en 2021 sur de hauts niveaux. La fréquentation a repris, avec des niveaux compris entre 75 et 95 % comparés à ceux de 2019 ; bien sûr, elle varie en fonction des réseaux. Les zones tertiaires de l’Île-de-France se trouvent dans la fourchette basse, alors que Lyon est remontée à 90 % début novembre. Les dommages sont moins importants en 2021, avec une perte estimée à 300 M€ pour les seuls réseaux urbains de province », déclare à News Tank le 09/11/2021 Marie-Ange Debon, présidente de l’UTP et présidente de Keolis.
« Le MaaS reste à un stade émergent et n’a de sens que si des solutions de mobilité pertinentes existent physiquement sur le territoire, notamment pour relier les centres-villes aux périphéries. Les micro-mobilités sont efficaces pour des trajets relativement courts et ne peuvent en aucun cas répondre aux besoins liés aux flux pendulaires. Le transport collectif est la colonne vertébrale du système, sa place est au cœur de la demande de mobilité et des services associés. Garantir la qualité de service, la ponctualité, la sécurité, nécessite des compétences managériales, logistiques, techniques et industrielles propres aux opérateurs de transport public », indique-t-elle.
« La crise sanitaire a été perturbante mais elle s’est accompagnée d’une prise de conscience accrue des enjeux climatiques. Elle fournit l’opportunité de repenser la place des transports publics dans la transition énergétique. L’accélération de l’électrification sur les bus est manifeste et massive dans l’urbain. Elle commence dans l’interurbain comme le montre la récente décision de la Région Sud de convertir une partie de sa flotte », ajoute-t-elle.
« La COP26, la présidence française de l’UE, les élections présidentielle et législatives de 2022 sont autant d’occasion de rappeler le rôle des transports publics et ferroviaires. A l’occasion de la présidentielle, l’UTP appelle les candidats à s’engager résolument pour les transports publics et ferroviaires, seuls capables d’apporter des solutions pour répondre aux enjeux de cohésions sociale et territoriale, de qualité de vie, de développement économique et d’urgence climatique. »
« Nous demandons une aide au rétrofit, qui peut constituer une bonne solution pour réduire les tensions sur le marché des bus électriques, et éviter l’achat de véhicules en provenance de pays non européens » (M.-A. Debon)
La crise sanitaire semble s’installer dans la durée. Quelles en sont les conséquences sur l’équilibre économique des transports publics ?
Le modèle économique des transports urbains a été ébranlé par la crise sanitaire. Les collectivités locales (Île-de-France incluse) ont perdu 40 % de leurs recettes commerciales en 2020, pour un montant total de 1,6 Md€. Les dommages sont moins importants en 2021, avec une perte estimée à 300 M€ pour les seuls réseaux urbains de province. Les mécanismes de compensation mis en place par le Gouvernement ont permis de maintenir l’offre à un niveau conséquent, et le doublement de l’enveloppe du 4e appel à projets TCSP contribue à soutenir l’investissement. L’Etat apporte ainsi plus de 10 % du coût des projets, qui représentent près de 10 Md€ investis pour les transports publics, l’ensemble des modes étant représentés y compris du téléphérique urbain.
Après avoir plongé en 2020, l’offre s’est rétablie en 2021 sur de hauts niveaux. La fréquentation a repris, avec des niveaux compris entre 75 et 95 % comparés à ceux de 2019 ; bien sûr, elle varie en fonction des réseaux. Les zones tertiaires de l’Île-de-France se trouvent dans la fourchette basse, alors que Lyon est remontée à 90 % début novembre.
Comment se dessine la mobilité post-Covid ? La voiture individuelle sera-t-elle durablement gagnante ?
L’évolution du prix des carburants devrait inciter les voyageurs à revenir vers les transports publics »L’impact du télétravail reste modéré et ne suffit pas à expliquer la démobilité persistante. Un grand nombre d’activités sociales n’ont pas encore pleinement repris. Toutefois, la congestion automobile est de retour dans les villes et leurs périphéries. L’évolution du prix des carburants devrait cependant contribuer à inciter les voyageurs à revenir vers les transports publics. Nous sommes confiants dans la poursuite de la reprise, et nous espérons revenir aux niveaux d’avant crise courant 2022. Mais, nous restons vigilants sur le maintien des gestes barrière, dont le port du masque dans les transports publics.
Malgré la crise, l’électrification des flottes se poursuit. Mais tous les réseaux en ont-ils les moyens ?
La crise sanitaire a été perturbante mais elle s’est accompagnée d’une prise de conscience accrue des enjeux climatiques. Elle fournit l’opportunité de repenser la place des transports publics dans la transition énergétique. L’accélération de l’électrification sur les bus est manifeste et massive dans l’urbain. Elle commence dans l’interurbain comme le montre la récente décision de la Région Sud de convertir une partie de sa flotte.
Le rapport Duron préconise d’adapter, en lien avec l’UE, le calendrier des obligations de verdissement des flottes »Même si le TCO des véhicules électriques tend à se réduire, nous avons besoin de mécanismes d’aide plus importants pour rendre l’équation économique réellement favorable. La réduction des coûts d’acquisition doit se poursuivre. Nous demandons également une aide au rétrofit, qui peut constituer une bonne solution pour réduire les tensions sur le marché des bus électriques, et éviter l’achat de véhicules en provenance de pays non européens. De plus, le rétrofit contribue à créer de l’emploi non délocalisable dans les territoires. Le rapport Duron préconise d’ailleurs d’adapter, en lien avec l’Union Européenne, le calendrier des obligations de verdissement des flottes pour laisser le temps aux filières de production européennes de s’organiser.
L’électrique n’est pas la seule option. Quid du GNV ?
Le recours au bioGNV permet de compenser les émissions de GES, il va donc faire partie du mix de la transition énergétique, au moins pour les dix ans à venir. Ensuite, l’hydrogène prendra sans doute le relai. Les collectivités qui ont investi dans le GNV ne vont pas revenir en arrière. Il ne faut pas oublier qu’aujourd’hui, les véhicules diesel représentent encore 80 % de la flotte en circulation dans les réseaux urbains. La priorité doit porter sur ces catégories de bus.
Depuis les dernières élections municipales, la gratuité semble gagner du terrain. Qu’en pense l’UTP ?
Dans le transport urbain de province, le voyageur paie en moyenne un euro par jour »Beaucoup de collectivités locales choisissent de faire l’expérience de la gratuité cantonnée à certains moments de la semaine ou à certaines catégories de population, ce qui permet d’obtenir un certain effet d’attraction sans dérive des coûts. Toutefois, le report modal obtenu reste limité et bien souvent focalisé sur le vélo ou la marche.
Le véritable levier du report modal face à l’autosolisme, c’est l’existence d’une offre de qualité, puisque le transport public est toujours moins cher que la voiture individuelle. Dans le transport urbain de province, le voyageur paie en moyenne un euro par jour. La gratuité est pertinente dans une logique de solidarité et d’inclusion, mais elle ne peut suffire à renforcer l’attractivité des transports collectifs.
Les investissements et la transition énergétique favorisent également l’attractivité des transports publics. Avec des véhicules électriques et tout un système qui en optimise l’efficacité, le BHNS offre une qualité de service assimilée à celle d’un tram.
Le développement des micro-mobilités et les solutions MaaS font aussi partie de la solution, avec l’arrivée de nouveaux acteurs. La place des opérateurs historiques est-elle remise en question ?
Avec le MaaS, l’enjeu est d’offrir à l’utilisateur la plus grande simplicité d’usage sans perdre la richesse des services proposés »Le MaaS reste à un stade émergent et n’a de sens que si des solutions de mobilité pertinentes existent physiquement sur le territoire, notamment pour relier les centres-villes aux périphéries. Les micro-mobilités sont efficaces pour des trajets relativement courts et ne peuvent en aucun cas répondre aux besoins liés aux flux pendulaires. Le transport collectif est la colonne vertébrale du système, sa place est au cœur de la demande de mobilité et des services associés. Garantir la qualité de service, la ponctualité, la sécurité, nécessite des compétences managériales, logistiques, techniques et industrielles propres aux opérateurs de transport public. Cette expertise est d’autant plus importante pour aborder la transition énergétique et faire face aux contraintes qui y sont liées. L’enjeu est d’offrir à l’utilisateur la plus grande simplicité d’usage sans perdre la richesse des services proposés par chacun des acteurs. Enfin, le système doit être piloté efficacement pour fiabiliser et enrichir les données d’entrée, de réinjecter la connaissance issue de l’analyse des usages, de promouvoir certaines offres via le levier tarifaire, etc.
Les grands opérateurs travaillent de plus en plus en coopération avec des start-up sur certaines missions, notamment liées au numérique, dans une logique d’intégrateur. Dans le cadre des renouvellements de DSP, les collectivités nous demandent de travailler sur le positionnement et la gestion des parcs-relais, des lignes périphériques structurantes, du TAD et sur le développement de plateformes digitales de type MaaS intégrant du covoiturage. La réflexion porte sur la complémentarité entre les modes.
La question des data est déterminante. Là aussi, des acteurs extérieurs au transports publics se positionnent.
La gestion des données et leur compréhension sont deux choses différentes. Il ne suffit pas de savoir compter les déplacements pour les analyser, exploiter finement les data et définir le dimensionnement des services de transport. Derrière un nombre donné de trajets, il peut y avoir différents motifs de déplacements, différentes personnes tout au long de la semaine.
Les questions sociales constituent l’une des missions de l’UTP. Où en sont les négociations liées à l’ouverture à la concurrence dans le ferroviaire ?
Depuis la réunion tripartite du 9/07/2021 convoquée à l’initiative du ministère des Transports, nous poursuivons les négociations sur le sac à dos social, dont les facilités de circulation, dans le prolongement de la loi sur le nouveau pacte ferroviaire, avec l’objectif de trouver un accord d’ici la fin 2021. Nos prochaines réunions avec les organisations syndicales représentatives (CGT, UNSA, SUD, CFDT) sont déjà fixées au 16/11, au 30/11 et au 21/12.
Les négociations se poursuivent sur les autres garantie (logement, accès médecine de soins spécialisés) susceptibles d’être incluses dans le sac à dos social des salariés appelés à être transférés dans le cadre de l’ouverture à la concurrence.
Facilités de circulation : vers un accord avant la fin 2021
Avec l’ouverture à la concurrence des TER, s’est posé le sujet des facilités de circulation accordées aux agents SNCF et à leurs ayants droits : il était nécessaire d’encadrer ces dispositifs dans le cas de transferts de personnels. L’UTP et les organisations syndicales se sont engagées à trouver les voies d’un accord sur les facilités de circulation lors d’une réunion tripartite convoquée à l’initiative du ministère des Transports, le 09/07/2021. Le rapport établi par l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales), le CGEDD (Conseil général de l’environnement et du développement durable) et l’IGF (Inspection générale des finances) a permis de dégager quatre scénarios qui servent de base à la négociation.
« Le 26/10, l’UTP a introduit la proposition faite aux organisations syndicales représentatives sur le point relatif aux facilités de circulation dans la 3eme version du projet d’accord transmise le 18 octobre dernier et discuté en séance de négociation le 26 octobre », explique Claude Faucher
directeur général adjoint de la Mobilité, des Transports, des Déplacements et des Infrastructures @ Métropole Aix-Marseille-Provence (AMP)
, délégué général de l’UTP.
Ce texte prévoit d’assurer la continuité totale :
• des droits de FC des salariés et des retraités SNCF et de leurs ayants droits respectifs, soit 1 115 000 personnes, sur les services SNCF transférés ;
• apportant de plus une base juridique incontestable aux FC des enfants majeurs et des ascendants et normalisant l’avantage en nature que les FC constituent aux règles de l’assujettissement social et fiscal dont elles relèvent ;
• des droits des FC des salariés transférés et de leurs ayants droits sur l’ensemble du périmètre actuel (services SNCF et les services transférées).
« Dès lors que l’accord aura été signé, sans faire l’objet d’opposition majoritaire, l’UTP sera amenée à construire ce dispositif. D’une part, l’UTP devra négocier une convention avec l’ACOSS Urssaf Caisse nationale, anciennement Agence centrale des organismes de sécurité sociale sur les conditions d’évaluation de l’avantage en nature et de fiscalisation des entreprises, des salariés et des retraités. D’autre part, l’UTP désignera la structure qui mettra en œuvre les dispositifs de suivi de la délivrance des droits à Facilités de circulation (salariés SNCF et autres entreprises, retraités, ayants droit), et de compensation inter-entreprises pour le versement des coûts correspondants aux FC depuis l’ensemble des employeurs vers les seules entreprises ferroviaires de voyageurs dont les services seront accessibles aux bénéficiaires de FC, soit a minima la SNCF et tous les opérateurs de services transférés par décision d’une AO dans le cadre de l’ouverture à la concurrence. Un important travail devra donc être réalisé au cours des 24 prochains mois pour rendre l’ensemble opérationnel au 01/01/2024, date à laquelle devraient commencer à se produire les premiers transferts effectifs de salariés », poursuit Claude Faucher.
Autre sujet majeur, celui des recrutements. Comment desserrer la tension ?
Nous travaillons sur notre image et nous cherchons à toucher de nouvelles populations, ainsi qu’à féminiser les recrutements »Comme dans d’autres secteurs économiques, nos métiers sont en tension. Nous avons des besoins sur la conduite, mais aussi dans la maintenance. La transition énergétique implique de nouveaux savoir-faire, ce qui peut contribuer à accroître l’attractivité auprès des candidats. Nous travaillons sur notre image et nous cherchons à toucher de nouvelles populations, ainsi qu’à féminiser les recrutements.
Au côté de la FNTV • Association professionnelle qui rassemble tous les métiers et toutes les entreprises (TPE, PME, groupes) du transport par autocar • Création : 1992 • Représente 1 300 entreprises en France… , nous avons obtenu le passage à 18 ans du permis D. Pour mieux faire connaître les carrières du transport urbain de voyageurs, nous sommes engagés dans une démarche visant à définir une marque « branche TU » qui conduirait à la création d’une association pour la promotion des métiers du transport public urbain, miroir de « Futur en Train », qui devrait être mise en place au 1er semestre 2022. Nous souhaitons également participer au Big tour organisé par l’OPCO Mobilités à l’été 2022 afin d’aller à la rencontre des jeunes.
La sensibilité aux questions climatiques devrait favoriser le recours aux transports publics. Comment l’UTP compte-t-elle faire valoir ses arguments ?
La COP26, la présidence française de l’UE, les élections présidentielle et législatives de 2022 sont autant d’occasion de rappeler le rôle des transports publics et ferroviaires. A l’occasion de la présidentielle, l’UTP appelle les candidats à s’engager résolument pour les transports publics et ferroviaires, seuls capables d’apporter des solutions pour répondre aux enjeux de cohésions sociale et territoriale, de qualité de vie, de développement économique et d’urgence climatique.
L’UTP prépare un manifeste du transport public et ferroviaire à l’attention des candidats à l’élection présidentielle de 2022 »L’UTP prépare un manifeste du transport public et ferroviaire à l’attention des candidats à l’élection présidentielle de 2022, qui proposera 20 mesures réparties en quatre axes pour relever les défis sociaux, économiques et environnementaux :
- développer une offre de transports publics et un réseau ferroviaire performants qui structurent et connectent les territoires, par une mobilisation de l’État et des institutions européennes, notamment dans le cadre du Green Deal et de la Stratégie européenne pour une mobilité durable et intelligente ;
- prioriser l’offre de mobilité respectueuse de la planète ;
- privilégier les modes de transport sûrs qui garantissent l’accès à la mobilité pour tous et en toutes circonstances.
- donner aux Autorités organisatrices de la mobilité, sociétés de projet et autres maîtres d’ouvrage, tous les leviers financiers et juridiques pour assurer une gouvernance cohérente de la mobilité durable sur leur territoire et disposer des moyens nécessaires à l’exercice de leurs compétences, pour refonder le modèle économique des transports publics, lourdement affecté par la crise sanitaire.
Parmi les mesures préconisées figure une proposition de formation à l’utilisation des transports publics dans le cadre scolaire, au collège et au lycée. Des campagnes de sensibilisation sont régulièrement menées avec l’Anateep Association nationale pour les transports éducatifs de l’enseignement public auprès des élèves de CM2 ou de 6e, mais nous souhaitons étendre ces initiatives. Nous constatons depuis des années que trop de nos concitoyens ne savent pas lire un plan de réseau ou repérer leur trajet. Ces modules de formation doivent également permettre de mieux faire connaître les métiers et les carrières du transport public.
Union des transports publics et ferroviaires (UTPF)
• Organisation professionnelle
• Création : 1899
• Mission : regroupe les entreprises de transport public urbain, entreprises de transports ferroviaires (voyageurs et fret) et gestionnaires d’infrastructures ferroviaires en France
- représente 230 entreprises de transport urbain et ferroviaire
- Depuis 2008, édite un Observatoire de la mobilité, afin de disposer d’une photographie des utilisateurs de transports publics en France
• Conseil d’administration : 24 membres
• Effectifs : 46 personnes
• Présidente : Marie-Ange Debon (présidente de Keolis)
• Déléguée générale : Florence Sautejeau
• Contact : Juliette Fraile, directrice de la communication
• Tél. : 01 48 74 63 51
Catégorie : Groupement professionnel
Adresse du siège
17, rue d’Anjou75008 Paris France
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Fiche n° 10292, créée le 29/09/2020 à 12:42 - MàJ le 16/10/2024 à 11:29
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