Think Mobilités 2024 : « Cinq leviers d’action pour le secteur des mobilités » (P. Berteaud, Cerema)
« La prise de conscience est aujourd’hui générale sur l’urgence à agir pour atténuer le changement climatique, et la part importante que doivent prendre les déplacements dans cet effort. Des efforts importants sont indispensables pour le secteur de la mobilité, à travers cinq leviers d’action : améliorer la consommation énergétique des véhicules, diminuer l’intensité carbone de l’énergie (notamment par l’électrification des usages et des véhicules), continuer avec volontarisme à favoriser le report modal en développant les transports collectifs et les modes actifs, améliorer le remplissage des véhicules, (notamment via le covoiturage), modérer et orienter la demande de transport », indique Pascal Berteaud
Directeur général @ Cerema
• Pascal Berteaud est X-Ponts. Il a occupé différents postes de management opérationnel dans le secteur parapublic, postes en administration centrale et fonctions en cabinet.
, directeur général du Cerema
• Établissement public à caractère administratif sous la tutelle du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires• Création : 2014• Réseau : 26 implantations en…
, lors de sa keynote « La coopération territoriale au service de la résilience », en ouverture du Think Mobilités « Décarbonation des mobilités : quels investissements, coordination et compétences ? » organisé par News Tank Mobilités le 19/03/2024.
280 personnes sont inscrites à l’événement qui se tient le 19/03/2024 de 9h à 14h à Sorbonne Université, Campus Pierre et Marie Curie (Paris).
Sa prise de parole est suivie par d’autres keynotes sur les thématiques suivantes :
• « Quels soutiens à la décarbonation ? » par Baptiste Perrissin Fabert
Directeur général délégué en charge du pôle expertise @ Ademe • Doctorat en économie @ AgroParisTech (Institut national des sciences et industries du vivant et de l’environnement)
, directeur général délégué, Ademe
• Établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) placé sous la tutelle conjointe du ministère de la Transition écologique et solidaire et du ministère de l’Enseignement supérieur…
;
• « Leviers de décarbonation : entre technologie et sobriété », par Aurélien Bigo, chercheur associé à la Chaire énergie et prospérité de l’Institut Louis Bachelier ;
• « Trajectoire partagée et ambitions d’un exploitant ferroviaire » par Loïc Brabant, directeur RSE TER, SNCF Voyageurs.
Six tables rondes sont également au programme.
« La transition des mobilités devra être environnementalement efficace, économiquement soutenable, socialement juste et inclusive » (Pascal Berteaud, Cerema)
« La prise de conscience est aujourd’hui générale sur l’urgence à agir pour atténuer le changement climatique, et la part importante que doivent prendre les déplacements dans cet effort.
Le secteur des transports reste en effet le plus émetteur en France avec 30 % des gaz à effet de serre, assez loin devant l’agriculture, l’industrie et construction, le résidentiel et tertiaire, l’énergie et les déchets. Au sein des transports, les véhicules particuliers représentent un peu plus de la moitié des émissions, contre un quart pour les poids lourds et 15 % pour les utilitaires légers.
On sait que, parmi les différents facteurs, le nombre de déplacements et les distances parcourues par les véhicules particuliers ont continuellement augmenté jusqu’à la fin des années 2010, alors que le taux de remplissage des véhicules a baissé. Seule l’efficacité énergétique accrue a permis de contenir la hausse des émissions, sans les faire baisser très significativement jusqu’à présent, contrairement aux autres secteurs.
Des efforts importants sont indispensables pour le secteur de la mobilité, à travers cinq leviers d’action :
- améliorer la consommation énergétique des véhicules ;
- diminuer l’intensité carbone de l’énergie (notamment par l’électrification des usages et des véhicules) ;
- continuer avec volontarisme à favoriser le report modal en développant les transports collectifs et les modes actifs ;
- améliorer le remplissage des véhicules, (notamment via le covoiturage) ;
- modérer et orienter la demande de transport.
Ces évolutions nécessaires ne vont pas de soi, quand on sait combien la mobilité constitue un enjeu majeur de fonctionnement de nos sociétés actuelles. Elle permet aux personnes de réaliser leurs diverses activités et aux entreprises de fonctionner. Ainsi, l’atteinte de la neutralité carbone ne peut être l’affaire de quelques secteurs ou groupes de population. Tous les acteurs économiques et l’ensemble de la population sont concernés par la réalisation de cet objectif.
Les mesures qu’elle exige induiront d’inévitables changements de comportements, non seulement dans nos manières de nous déplacer, mais aussi dans notre propension à le faire. Elles s’accompagneront vraisemblablement d’un renchérissement des coûts de la mobilité. Ainsi, les technologies à déployer ne devront pas ignorer les enjeux sociaux associés, les plus précaires devant être accompagnés pour que les changements demandés, voire imposés, puissent être supportés par l’ensemble de la population.
La définition de stratégies globales, partagées et cohérentes, en concertation avec les acteurs économiques et les populations des territoires, doit donc intégrer les évolutions de mobilité rendues nécessaires par les objectifs de transition écologique et énergétique : la transition des mobilités devra être environnementalement efficace, économiquement soutenable, socialement juste et inclusive.
C’est tout l’enjeu d’une coopération territoriale renforcée, de faire preuve de résilience dans ces transitions, pour pouvoir ensemble, selon la formule consacrée, éviter l’ingérable, c’est-à-dire atténuer autant que faire se peut le changement climatique, et gérer l’inévitable c’est-à-dire s’adapter aux évolutions déjà inéluctables.
Pour évoquer plus directement le lien entre coopération territoriale et résilience, et replacer ce sujet dans le cadre de cette séquence introductive et celui plus global de la journée, je vous propose de raisonner en trois temps.
1) Il s’agit tout d’abord de mobiliser un triptyque finances / compétences / gouvernance au service de la résilience :
Les défis qui sont devant nous supposent des moyens colossaux.
Ils sont d’ordre financier, pour les acteurs publics comme privés, et avec des soutiens de l’État que Baptiste Perrissin-Fabert évoquera.
Ils supposent une expertise de haut niveau, internes à chacun des acteurs, mais aussi mutualisée pour leur apporter le soutien nécessaire.
C’est ce que fait le Cerema, à travers sa triple mission, d’abord de production, diffusion, et valorisation des connaissances ; ensuite d’innovation, avec des entreprises et opérateurs de l’État ; enfin d’accompagnement des territoires, auprès notamment des plus de 850 collectivités et groupements, dont tous les plus importants, qui ont fait le choix d’adhérer à l’établissement depuis un an.
À la charnière de ces différentes grandes missions, le Cerema travaille beaucoup à la mise en réseau des territoires, de différentes manières.
Il peut le faire de façon ponctuelle sous la forme d’accompagnements collectifs réunissant des collectivités ou EPCI Établissement public de coopération intercommunale autour d’actions conduites en parallèle sur chaque territoire, les échanges qu’il anime permettant d’avancer ensemble sur les aspects méthodologiques, dont ceux de la gouvernance, comme sur les mesures techniques. Cela peut donner lieu ensuite à des évaluations en commun et des retours d’expérience formalisés permettant une diffusion aux autres collectivités désireuses de se lancer dans des actions similaires.
Ce peut être aussi de façon plus permanente, via sa démarche Expertises territoires qui, à travers des communautés thématiques ou territoriales, offre aux acteurs et décideurs de terrain une plateforme de partage et de collaboration pour partager les expériences et développer les expertises en faveur de la transition écologique des territoires, en développant la transversalité et les contacts entre les métiers et les disciplines, en interrogeant et éclairant les enjeux d’aujourd’hui et de demain, en proposant une interface simple à utiliser et de nombreux outils collaboratifs pour répondre aux besoins des acteurs.
2) Il s’agit ensuite de s’appuyer sur la coopération territoriale pour plus d’efficacité et de robustesse, donc de résilience :
La coopération territoriale est d‘abord, bien sûr celle de tous les types de collectivités et groupements. Même si la loi NOTRE Loi du 07/08/2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République et la LOM Loi d’orientation des mobilités l’ont rationalisé, le contexte institutionnel des mobilités reste complexe, comme celui de l’action publique en général.
Une autorité organisatrice doit forcément composer avec les autres, qu’elles soient limitrophes ou agissant sur le même territoire à un autre niveau de responsabilité.
C’est évidemment le cas des autorités locales, de la plus urbaine à la plus rurale, avec l’acteur incontournable qu’est la Région. Et les nouveaux projets de SERM Service Express Régional Métropolitain , services express régionaux métropolitains sur lesquels le Cerema accompagne l’État, les collectivités et la Société des Grands Projets, va donner une nouvelle impulsion à la coopération entre régions et métropoles.
Une AOM Autorité organisatrice de la mobilité doit aussi travailler avec les gestionnaires des voiries support des services de mobilités qu’elle propose, que ces gestionnaires soient AOM ou non. Et notamment les départements qui, bien qu’ayant perdu ce statut, jouent un rôle essentiel dans la maillage du territoire, mais aussi dans certaines actions de mobilités, par exemple en aménageant un réseau de pistes cyclables hors agglomération, ou des aires de covoiturage.
Sur la thématique du covoiturage, le Cerema agit depuis longtemps et a lancé un appel à partenaires qui va le conduire à accompagner très prochainement, de façon individuelle et collective, près d’une vingtaine de territoires, permettant d’aller vers des stratégies intégrées de covoiturage : services, infrastructures (voies réservées), communication/animation.
La coopération territoriale est aussi celle de tous les types de compétences au sein des collectivités. L’interaction très forte des mobilités avec les autres compétences, en matière d’aménagement du territoire, de planification et d’urbanisme opérationnel, de développement économique et d’emploi, de tourisme et loisirs, de logement et d’action sociale… Ceci conduit les autorités organisatrices à coopérer avec des collectivités qui ne le sont pas. Elle exige aussi, au sein de chacun des acteurs, une transversalité organisée et efficace. La répartition verticale des compétences, aussi bien entre les élus (adjoints aux maires, vice-présidents), qu’entre les services, ne doit jamais empêcher l’expression d’une vision globale, la construction de stratégies coordonnées, la mise en œuvre d’actions concrètes unissant les objectifs, les moyens, les cibles.
La coopération territoriale est enfin celle de tous les types d’acteurs dans les territoires. Nous l’avons dit, la transition des mobilités est l‘affaire de tous. Les acteurs publics doivent mobiliser, selon leur niveau, tous les partenaires possibles, ceux de l’ingénierie publique et privée, des sociétés d’autoroute, des entreprises œuvrant dans le domaine de la mobilité, depuis les gros exploitants ou constructeurs jusqu’aux start-up développant des services de niche.
Les autorités doivent aussi engager tout le tissu local dans les transitions, celui des habitants et des réseaux associatif, par la communication, la concertation, des incitations financières ou réglementaires ; celui des établissements d’enseignement, d’accueil ; celui des hébergeurs, constructeurs et aménageurs ; et celui des entreprises en général, en aidant leurs réflexions et actions vers des pratiques vertueuses en matières de logistique, de déplacement professionnels ou domicile-travail.
Le Cerema anime par exemple le développement de Plans de Mobilités Employeurs ou Inter-Entreprises, en lien avec l’Ademe.
Nous copilotons également, avec Logistic Low Carbon et Rozo, le programme « InterLUD+ » sur la logistique urbaine, visant à accompagner 70 agglomérations dans la mise en place, avec les acteurs économiques de leur territoire, d’une politique partagée et d’actions innovantes de logistique urbaine.
3) Il s’agit enfin de faire de la décarbonation un facteur de résilience pour tous les types de territoires :
Voilà plus de dix ans désormais que le Cerema réfléchit et publie sur la résilience des territoires, seul ou avec le CGDD Commissariat général au développement durable et d’autres partenaires.
La résilience est une mise en mouvement, une recherche perpétuelle d’équilibre dynamique entre des caractéristiques paradoxales et des processus contraires : court terme et temps long, échelle locale et mondialisation, redondance et efficacité, sur-mesure et prêt-à-porter, autonomie et dépendance… On est résilient si on sait trouver les capacités nécessaires pour s’adapter face à des aléas qui menacent, et maintenir un niveau de fonctionnement grâce aux capacités et à la souplesse du système.
Pour nous, un territoire résilient est entendu comme un territoire en mouvement, capable :
- d’anticiper des perturbations, brutales ou lentes, grâce à la veille et à la prospective,
- d’en minimiser les effets,
- de se relever et rebondir grâce à l’apprentissage, l’adaptation et l’innovation,
- d’évoluer vers un nouvel état en équilibre dynamique préservant ses fonctionnalités,
- de décider et construire cette démarche démocratiquement.
Les stratégies développées en réponse aux crises qui touchent les territoires sont extrêmement variées, et doivent reposer, dans la cadre d’une approche territoriale systémique, sur une analyse des différents types de vulnérabilité et de tous les aspects qui font un territoire : politiques, sociaux, économiques, environnementaux, démographiques, historiques, culturels, patrimoniaux…
Sur ces bases, les territoires qui décarbonent leurs activités, leurs mobilités, progressent vers la résilience. Décarboner est le meilleur moyen d’atténuer le changement climatique, pour son propre territoire et comme contributeur à l’action pour son pays et la planète, et ceci est encore plus vrai dans des territoires particulièrement exposés, comme ceux que nous accompagnants en montagne, sur le littoral, en Outre-mer. Développer des mobilités alternatives performantes et accessibles, c’est aussi favoriser le développement économique de son territoire, sa cohésion sociale. Le faire à travers des démarches de coopération, sur son territoire et avec les autres, c’est éviter des concurrences stériles, rendre l’action plus économe, plus visible, plus efficace et donc plus résiliente.
Pour conclure, les pressions qui s’exercent sur nos territoires et leurs décideurs vont malheureusement s’amplifier dans les années et décennies à venir, les contraintes budgétaires comme les aléas climatiques ou d’autres.
C’est par une coopération renforcée qu’un maximum de résilience pourra être atteint, et avec la mobilisation de tous les moyens possibles, financiers et techniques.
Vous pouvez compter sur ma volonté, et sur la motivation et l’expertise de nos équipes, pour nous engager totalement au côté des territoires dans ces défis majeurs."
Pascal Berteaud, directeur général du Cerema, lors de Think Mobilités le 19/03/2024
Pascal Berteaud
Directeur général @ Cerema
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Parcours
Directeur général
Coordinateur général des contrats de transition écologique
Directeur de cabinet du groupe Les Républicains
Directeur général
Directeur adjoint de cabinet
Directeur général
Directeur de l’eau
Directeur adjoint de l’eau
Directeur du service public
Conseiller technique
Sous-directeur de la prospective et des projets
Chef du département de l’aménagement et de l’urbanisme
Établissement & diplôme
Master of business administration
Ingénieur
Ingénieur
Fiche n° 41017, créée le 07/10/2020 à 16:36 - MàJ le 19/03/2024 à 09:21
Cerema
• Établissement public à caractère administratif sous la tutelle du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
• Création : 2014
• Réseau : 26 implantations en France
• Missions :
- fournir un appui aux collectivités en matière d’ingénierie et d’expertise technique ;
- appuyer les politiques publiques en matière d’aménagement, de cohésion territoriale et de transition écologique et énergétique ;
- centre de ressources et d’expertises techniques et scientifiques ;
- lien entre les administrations centrales, les services déconcentrés de l’État, les collectivités territoriales et l’ensemble des acteurs qui contribuent à la mise en œuvre des politiques publiques dans les champs du développement durable.
• Six champs d’intervention : expertise et ingénierie territoriale ; bâtiment ; mobilités ; infrastructures de transport ; environnement et risques ; mer et littoral
• Budget : 359 M€
• Effectifs : 2 424 employés (2023)
• Présidente du conseil d’administration : Marie-Claude Jarrot (depuis décembre 2020)
• Directeur général : Pascal Berteaud
• Contact : Benoît Ronez, directeur délégué à la communication et la stratégie
• Tél. : 06 12 73 55 56
Catégorie : Etat
Adresse du siège
Cité des mobilités25 avenue François Mitterrand
69674 Bron Cedex France
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Fiche n° 10272, créée le 29/09/2020 à 10:32 - MàJ le 12/11/2024 à 17:24