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Pénurie de personnel : « La SNCF et les nouveaux entrants sont touchés » (S. Mariani, T. Cavel, CFDT)

News Tank Mobilités - Paris - Entretien n°262885 - Publié le 06/09/2022 à 18:41
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Sébastien Mariani et Thomas Cavel - ©  CFDT

« De nombreux services sont déjà en sous-effectif et nous manquons d’agents de la circulation, d’agents d’entretien du matériel, d’agents de maintenance de voies et d’agents d’escales dans les gares. Dès lors que des postes viennent à manquer, le service et la production ne peuvent pas être assurés. Il s’agit d’emplois indispensables à la vie du pays, mais qui sont peu valorisés », déclarent Sébastien Mariani Conseiller groupe CFDT @ Conseil économique, social et environnemental (Cese) • Secrétaire général adjoint Fédération générale transports et environnement @ CFDT • Secrétaire général adjoint de… , secrétaire général adjoint de la CFDT Confédération française démocratique du travail Cheminots (UFCAC-CFDT), et Thomas Cavel Secrétaire général @ CFDT Cheminots
, secrétaire général CFDT Cheminots, à News Tank le 06/09/2022.

« Aujourd’hui, il y a une question d’attractivité et d’équité dans cette période de transition. Certains salariés devront partir dans le privé et on leur proposera peut-être de nouveaux salaires. Des entreprises achèteront fortement des compétences phares mais des métiers seront lésés. Dans une période de transformation forte, cela pourrait provoquer des  tensions entre les salariés et c’est le contraire de ce que l’on veut promouvoir. »

« L’outil industriel réseau doit être solidifié, or tous les échanges que nous avons pu avoir ne vont pas dans ce sens. Le président de la SNCF a demandé 100 Md€ d’investissements sur 15 ans pour le ferroviaire afin de doubler la part modale de ce mode de déplacement en France. Le ministre des Transports, lui, a annoncé que cette somme serait atteinte en dix ans sans qu’il y ait besoin a priori d’un plan spécifique. Si l’on regarde la source de financement du réseau par l’État, il s’agit d’un contrat de performance signé et à la CFDT, nous pensons qu’il s’agit d’un contrat de perfusion plus que de performance. »

« Le panorama du prochain mandat syndical est le suivant : côté SNCF, l’avenir va se jouer au niveau des filiales, les opérateurs tiers vont se bousculer pour gagner les marchés et les salariés seront au milieu de cette bataille. Leur protection est l’enjeu social absolu de ces élections. »

Sébastien Mariani et Thomas Cavel présentent la position de la CFDT Cheminots avant les prochaines élections professionnelles à la SNCF qui auront lieu en novembre 2022. Ils abordent les conséquences de la question des transferts de salariés, l'état du réseau ferré national ou l’attractivité des différents métiers de cheminots.

À l’approche des élections professionnelles à la SNCF prévues en novembre 2022, News Tank publie une série d’entretiens avec les principales organisations syndicales représentatives à la SNCF.


« La situation s’est dégradée depuis la très mauvaise loi de juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire »

Du 17 au 24/11/2022 ont lieu les élections professionnelles à la SNCF. Quels sont les enjeux du scrutin ? 

Sans surprise, l’enjeu majeur du scrutin est l’obtention d’une représentation suffisante de la CFDT chez les salariés pour traiter efficacement des sujets de transformations en cours et à venir par la protection des droits et la conquête d’avancées sociales. Depuis la très mauvaise loi de juin 2018, qui a profondément changé le système ferroviaire français, la situation s’est dégradée après son annonce, sa mise en place et sa réalisation.

Dès le vote de ce pacte ferroviaire, nous avions signalé ses dérives, mais aujourd’hui nous pouvons l’affirmer avec certitude car nous avons des preuves tangibles. L’une des problématiques actuelles qui en découle est l’ouverture à la concurrence. Son application connaît une accélération phénoménale sauf que les dispositions sociales qui l’accompagnent s’appliquent beaucoup plus lentement. Cette décision politique a été fortement reprise par les exécutifs régionaux. Aujourd’hui, mis à part en Occitanie et en Bretagne, le sujet est sur la table de tous les exécutifs régionaux. La Région Bourgogne-Franche-Comté par exemple a fait le choix d’ouvrir toute sa convention ferroviaire au privé (une décision que la CFDT Cheminots conteste devant le tribunal administratif). 

Côté SNCF, l’avenir va se jouer au niveau des filiales »

Dans le prochain mandat syndical à venir, nous allons voir comment nous allons pouvoir traiter cette mauvaise évolution. Elle devient applicable partout et la SNCF a décidé de recourir à des filiales dans son fonctionnement. Le panorama est donc le suivant : côté SNCF, l’avenir va se jouer au niveau des filiales, les opérateurs tiers vont se bousculer pour gagner les marchés et les salariés seront au milieu de cette bataille. Leur protection est l’enjeu social absolu de ces élections.

Que pensez-vous de la question des transferts de salariés ? 

Pour un salarié cheminot à la SNCF, l’horizon correspond à un transfert ou à un transfert. Soit il doit partir dans une autre entreprise, soit il est muté dans une filiale de la SNCF avec des conditions sociales inconnues. Cela nous inquiète grandement et nous nous demandons si l’ouverture à la concurrence garantit l’équilibre économique, une bonne qualité de la production et une circulation en toute sécurité. On sait que non. 

Des exemples dans d’autres pays vous alarment-ils ? 

Si l’on regarde chez nos voisins italiens, nous apprenons que l’ouverture à la concurrence doit passer par un investissement important sur le réseau ferré. Il faut que l’outil industriel réseau soit solidifié, or tous les échanges que nous avons pu avoir ne vont pas dans ce sens. Le président de la SNCF a demandé 100 Md€ d’investissements sur 15 ans pour le ferroviaire afin de doubler la part modale de ce mode de déplacement en France. Le ministre des Transports, lui, a annoncé que cette somme serait atteinte en dix ans sans qu’il y ait besoin a priori d’un plan spécifique. Si l’on regarde la source de financement du réseau par l’État, il s’agit d’un contrat de performance signé et à la CFDT, nous pensons qu’il s’agit d’un « contrat de perfusion » plus que de « performance ». Avec un réseau vieillissant, la production se dégrade. Que cela soit à la SNCF ou chez un autre opérateur, la circulation des trains ne se fera pas correctement tant que l’investissement ne sera pas effectué. En Italie, en Allemagne ou en Suisse, ce financement est trois à quatre fois plus important sur le réseau ferroviaire. Que l’on ouvre à la concurrence ou pas il y a un fondamental à faire bouger dans l’équation de financement du ferroviaire par les pouvoirs publics. 

Il faut des accords de groupe pour garantir les droits des salariés »

Comment la CFDT veut-elle agir à ce propos ? 

L’objet de l’action syndicale est la défense des salariés, des droits positifs et de réunir les conditions auprès des différents partenaires pour convaincre de la nécessité d’investir. La voix de la CFDT est basée sur l’analyse, la proposition et le cas échéant sur la mobilisation. Nous avons la ferme conviction à la CFDT Cheminots que pour une transition écologique en matière de transports, il faut une plus forte présence du ferroviaire. Si nous avions une voix plus forte au sein du monde ferroviaire et donc de la SNCF, nous pourrions peser encore davantage vers cette voie. 

La CFDT Cheminots a publié un manifeste public qui opère un lien entre ce qui faudrait faire pour réinvestir sur le ferroviaire, pour consolider cet outil abîmé et ancrer l’utilité sociale du train dans le cadre de la transition écologique. Nous faisons l’unanimité sur ce sujet, mais entre l’unanimité d’opinion et la mise en acte, il y a un grand écart. Notre syndicat a essayé de préserver au maximum l’unité sociale mais elle est grandement menacée par l’éclatement du groupe. Comme la CFDT Cheminots le revendique depuis 2018, il faudrait des accords de groupe pour garantir les droits et négocier des protections supplémentaires partout dans le groupe. 

Notre secteur d’activité peine à embaucher »

Sur quels points la CFDT se différencie-t-elle des autres syndicats à la SNCF ? 

Notre méthode est claire, nous sommes dans la proposition et dans la mobilisation. Quand un problème survient, nous ne sommes pas dans la stricte dénonciation, nous sommes dans la construction de garanties pour les salariés. Cela passe par des accords, par de la contractualisation , par la formation et l’information des salariés et nous croyons fermement à la création de conditions pour donner des garanties aux salariés. Certains syndicats sont dans une logique de « conflictualité » et de dénonciation, mais la CFDT Cheminots face à une situation crée des propositions pour protéger les salariés. Nous négocions et quand cela doit passer par de la mobilisation et du rapport de force, nous le faisons.

La question des salaires dans le ferroviaire est-elle importante dans vos prochaines négociations ? 

Elle est primordiale. Nous sortons d’un été émaillé d’une crise climatique, d’une crise énergétique ainsi que d’une crise géopolitique et l’un des outils pour y répondre : c’est le ferroviaire. Pourtant dans le ferroviaire, nous n’avons pas suffisamment de moyens, de financement, ni de personnels car les salaires sont trop faibles. Notre secteur d’activité peine à embaucher car les conditions de travail et les salaires ne sont pas à la hauteur de la responsabilité. Quant aux salariés déjà embauchés, ils sont de plus en plus nombreux à partir.

Des entreprises achèteront fortement des compétences phares »

Que se passera-t-il pour les salariés transférés ? 

Ils bénéficieront des rémunérations salariales de leur entreprise. L’outil de régulation dans un système ouvert à la concurrence est la convention de branche. C’est pour cela que la CFDT cheminots veut fortement peser sur les négociations car nous voyons que l’engagement, la compétence, les bonnes conditions de travail ne sont pas à la hauteur dans le ferroviaire. 

Aujourd’hui, il y a une question d’attractivité et d’équité dans cette période de transition. Certains salariés devront partir dans le privé et on leur proposera peut-être de nouveaux salaires. Des entreprises achèteront fortement des compétences phares mais des métiers seront lésés. Ainsi, les différences pourraient se creuser entre les métiers. Dans une période de transformation forte, cela pourrait provoquer des  tensions entre les salariés et c’est le contraire de ce que l’on veut promouvoir. Les cheminots subissent aujourd’hui les contraintes du secteur privé, sans bénéficier de justes contreparties et en même temps on continue de leur imposer  les contraintes du secteur public alors que leur statut a été fragilisé. Il s’agit de discours contradictoires contre lesquels nous nous battons et que nous cherchons à corriger en gagnant de nouveaux droits pour tous les salariés quel que soit son contrat de travail.

Ce manque de personnel pourrait-il impacter les acteurs qui arrivent sur le marché ? 

Comme la SNCF, ils seront touchés par les difficultés de recrutement. De nombreux services sont déjà en sous-effectif et nous manquons d’agents de la circulation, d’agents d’entretien du matériel, d’agents de maintenance de voies, d’agents d’escales dans les gares. Dès lors que des postes viennent à manquer, le service et la production ne peuvent pas être assurés. Il s’agit d’emplois indispensables à la vie du pays, mais qui sont peu valorisés.

Il y a des mouvements locaux face à ces conditions d’organisations de travail et de production dégradées »

Le temps de formation est important donc : c’est notamment le cas pour les conducteurs,, qui comme d’autres ressources rares, peuvent être incités à  changer d’entreprise. Les jeunes hésitent à s’engager car les contreparties économiques sont maigres contre une forte responsabilité pénale et un rythme de vie difficile. Il s’agit du cocktail adéquat pour faire baisser l’attractivité.

Actuellement, y a-t-il des points de bascule qui pourraient aboutir à un conflit social avec la direction ? 

Les sujets majeurs sont les salaires et la question de l’emploi et du sous-effectif. Nous sommes en pleine crise énergétique et nous sortons d’une crise sanitaire, pourtant on ne reconnaît toujours pas les travailleurs essentiels alors qu’une telle reconnaissance est indispensable. Aujourd’hui, il y a des mouvements locaux face à ces conditions d’organisations de travail et de production dégradées. Ces sujets là existent et ils maintiennent une tension forte avec la direction.

Les relations sociales entre les syndicats et la direction de la SNCF ont-elles évolué depuis la dernière élection ? 

En 2022, les sociétés de la SNCF n’ont pas des intérêts convergents. La CFDT est rattachée à la notion du groupe et d’unité sociale, une vision qu’elle partage assez régulièrement avec la direction du groupe. En revanche certaines SA n’ont pas le social pour priorité et font passer d’abord la construction d’un nouveau modèle économique qui voudrait s’affranchir des règles et accords passés. Depuis 2018, des crises sont survenues et des négociations ont été faites pour que la production soit assurée. Aujourd’hui, nous sommes toujours en crise, mais les orientations prises sur la question du pouvoir d’achat, de la rémunération et de l’emploi restent inadaptées à la situation d’urgence que nous constatons.

Sébastien Mariani


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Parcours

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Chef du service organisation et documentation
RESEAU FERRE DE FRANCE
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Chargé d'études

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Fiche n° 47122, créée le 06/09/2022 à 17:44 - MàJ le 21/01/2024 à 16:23

Thomas Cavel


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Fiche n° 42999, créée le 23/02/2021 à 08:35 - MàJ le 06/09/2022 à 18:30

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Fiche n° 10723, créée le 21/10/2020 à 11:18 - MàJ le 25/11/2022 à 15:53

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Fiche n° 10723, créée le 21/10/2020 à 11:18 - MàJ le 25/11/2022 à 15:53